Avocat à Nantes – Me Cottineau Droit des victimes & divorce

Pesticides : le combat d’une veuve d’agriculteur

Ouest-France

Il est tombé malade et est mort en quatre mois. Sa famille suspecte un empoisonnement par un produit utilisé dans ses cultures. Le caractère professionnel de sa maladie n’est pas reconnu. Pas encore ?

« Perdre son mari à 69 ans alors qu’il était jusque-là en bonne santé… Les gens autour de nous disaient : c’est pas vrai ! Je me suis retrouvée seule. »  Seule, avec des questions sans réponse. Femme d’agriculteur en Loire-Atlantique, elle se bat aujourd’hui pour que la lumière soit faite sur ce décès brutal en avril 2010. Son mari avait été admis le 3 décembre dans un service d’hématologie, pour un « syndrome myélodysplasique ». « Il est mort d’une hémorragie cérébrale. Mes trois enfants et moi, on veut la vérité. Pour nous, pour d’autres qui subissent ou subiront le même drame. »

Une rencontre sur le marché lui a mis un jour la puce à l’oreille. Deux femmes tractaient pour la projection d’un film sur la nocivité des pesticides. Grâce à elles, la veuve trouve le nom d’un avocat nantais, Stéphane Cottineau, familier des dossiers santé. Et la bataille commence, sur la base du certificat médical délivré par le service d’hématologie du CHU de Nantes, indiquant qu’«il existait chez ce patient une exposition professionnelle aux toxiques agricoles. De ce fait, une expertise pour maladie professionnelle peut être envisagée. » L’agriculteur n’aurait-il pas été exposé au benzène, liquide connu pour provoquer une gravissime maladie du sang ?

Un appel envisagé

L’Assurance obligatoire contre les accidents du travail et les maladies professionnelles (AAEXA), qui couvre les exploitants agricoles, refuse cependant la prise en charge : la maladie n’est pas inscrite au tableau des maladies professionnelles du régime agricole. Saisi à son tour, le Comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles rend un avis défavorable, estimant que le lien « direct et essentiel » entre la pathologie et l’activité professionnelle du défunt n’est pas établi.

« Les choses bougent, mais il y a toujours très peu de maladies professionnelles inscrites au tableau des agriculteurs », explique Stéphane Cottineau, qui mène depuis un an, avec la famille, une véritable « enquête policière ». À l’occasion d’un colloque, il tombe sur une expertise judiciaire toxicologique délivrée dans un dossier de même nature traité par le tribunal des affaires de sécurité sociale (Tass) de la Vienne. Surprise ! L’herbicide utilisé par l’agriculteur décédé contient bien un dérivé du benzène. Ce que le fabricant omet de préciser dans sa liste des composants.

Le Tass de Loire-Atlantique est donc saisi. Mais il a rendu, hier, une décision qui a stupéfait l’avocat : « Le tribunal dit que l’exposition au benzène n’est pas contestable. Mais il estime que le lien n’est pas établi entre la maladie et le travail de l’agriculteur. » Est-ce à dire que celui-ci aurait utilisé ces pesticides en dehors de son temps de travail ? « Curieuse idée. Pour autant, le Tass n’ordonne pas d’expertise supplémentaire comme je l’avais suggéré. Nous envisageons sérieusement de faire appel. »

 

Article paru dans le journal Ouest-france le 23 mai 2013 par Agnès CLERMONT.

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